Philippe Raybaudi : il répare des appareils photos anciens

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Publié le 04 septembre 2025

Maître artisan installé en Oisans, reconnu internationalement, Philippe Raybaudi redonne vie aux appareils photos argentiques anciens. Un travail d’orfèvre qu’il perpétue dans une démarche responsable. 

Photographie
Philippe Raybaudi dans son atelier de réparation d'appareils photo anciens au Freney-dOisans. © A.Breysse

Banc de mesure électronique, outillage de précision, pinceaux, lubrifiants, nettoyant optique, soufflettes… Depuis quarante-cinq ans, Philippe Raybaudi vit et travaille dans un environnement où la méticulosité est de mise et le silence bienvenu. Son métier ? Réparer et restaurer des appareils photographiques mécaniques anciens. 

Champenois d’origine, installé depuis 1995 dans un hameau reculé du Freney-d’Oisans, il ne regrette pas ce choix. “J’ai opté pour un autre mode de vie, plus simple, à l’écart du tumulte des villes pour travailler en harmonie avec le rythme qu’imposent ces objets souvent uniques”, explique-t-il

Des patients aux noms illustres

Ses « patients » se nomment Hasselblad, Leica, Rolleiflex, Panon ou encore Plaubel Makina, des appareils qui lui sont confiés par des particuliers (photographes amateurs, professionnels et collectionneurs), des écoles d’art et de photographie, qu’il répare sur devis. Les interventions sont complexes, souvent liées à des problèmes d’oxydation ou de défaut de lubrification des petits mécanismes.

Un métier rare, appris à l’ancienne

Sa passion est née à la fin des années 1970, bien avant l’arrivée de la photo numérique. Sensibilisé par son grand-père, photographe professionnel, et par son père, instituteur féru de techniques audiovisuelles, il se forme auprès de maîtres artisans qui lui apprennent à écouter la mécanique, à sentir les tolérances du bout des doigts et à fabriquer des outils n’existant plus. 

À 22 ans, il ouvre son premier atelier de réparation, à Troyes, tout en poursuivant des études d’ingénieur en électronique. Excellant dans son domaine, il est devenu au fil des années l’un des rares réparateurs au monde à maîtriser la restauration complète des Widelux, ces appareils photo mythiques fabriqués au Japon dans l’après-guerre

Une démarche de transmission

Mais son travail ne se limite pas à la technique. “Je prends le contre-pied de l’obsolescence programmée. Ici, on répare pour durer. Restaurer un appareil photo ancien, ce n’est pas seulement sauver un objet, c’est refuser le gaspillage et défendre une autre manière d’être dans sa relation au monde : plus lente, plus lucide, plus respectueuse.” 

Sur les réseaux sociaux et son site Internet, il documente son activité en toute transparence : les restaurations, les limites techniques, les devis… et distille de nombreux conseils. “Je crois qu’il est essentiel de faire connaître ces métiers rares, ces gestes qui subsistent à contre-courant et cette autre manière plus engagée de vivre et de transmettre.”

Widelux : une aventure mondiale

La particularité des appareils Widelux est cette tourelle rotative qui se déplace sur un arc de 140 degrés, de gauche à droite, pour créer de véritables images panoramiques optiques. Malheureusement, l’usine Panon qui les fabriquait à Tokyo a été détruite par un incendie au début des années 2000, ce qui a fait disparaître l’outil industriel, les plans et la documentation. 

Depuis trois ans, sous l’impulsion de l’acteur américain Jeff Bridges, une équipe allemande tente de reproduire cet appareil à l’identique. Et bien évidemment, pour relever ce défi colossal de rétro-ingénierie, elle a fait appel à Philippe Raybaudi et aux outils qu’il a développés préalablement.  

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Par: Richard Juillet