La Chèvrerie du Châtelard, une reprise réussie

  • Agriculture
© A. Mufflon

Publié le 17 oct. 2025

Laurine et Delphine ont relevé leur défi : reprendre la Chèvrerie du Châtelard à Autrans-Méaudre dans le Vercors, tout en assurant la pérennité de leur modèle, source d’équilibre professionnel et personnel. Exemple d'une reprise réussie.

Leur passion commune pour l’élevage caprin et la fromagerie les destinait à s’entendre. La Chèvrerie du Châtelard, où ensemble elles élèvent aujourd’hui quelque 73 chèvres de race alpine-chamoisée et fabriquent des produits laitiers de mars à décembre, dans le Vercors, a scellé leur association professionnelle. C’est Laurine Chauvet qui, la première, a posé ses valises à Autrans-Méaudre en Vercors. De retour du Québec, où elle avait connu une première expérience dans l’élevage de chèvres, la jeune agricultrice, native de la région nantaise, souhaite trouver un projet déjà existant et stable financièrement. "J’ai vu mes parents s’installer à leur compte et les débuts très compliqués qu’ils ont vécus, se remémore-t-elle. Se lancer dans une exploitation pérenne était pour moi le choix naturel." 

Grâce à l’outil de mise en relation Répertoire Départ Installation, qu’animent dans les départements les Chambres d’agriculture, elle fait la connaissance des précédents gérants de la Chèvrerie du Châtelard, désireux de trouver dans un premier temps une associée, puis finalement une repreneuse. Laurine en profite pour parfaire ses connaissances en comptabilité, gestion d'entreprise, techniques d'élevage et de transformation fromagère, en suivant des formations organisées par la Chambre d'agriculture de l’Isère.


À cette époque, Delphine Michel s’installe en famille dans le voisinage de la chèvrerie. L’Iséroise couve de longue date l’envie de s’établir en tant que cheffe d’entreprise agricole, sans encore avoir réussi à la concrétiser. Après une période de stage test, durant laquelle elle apprend à connaître l’exploitation et conforte sa décision, elle devient l’associée de Laurine. "J’avais aussi eu mes propres expériences dans le monde agricole, où j’avais essayé de me lancer avec d’autres associés, explique Delphine. Quand on trouve les bonnes personnes, pour le bon projet, ça se sent tout de suite."

Une bonne répartition des rôles

Si les deux agricultrices disent d'une même voix qu'elles ont trouvé "la ferme qui leur correspondait", elles y jouent chacune leur rôle. Delphine s’occupe de l’élevage des chèvres sur 17 hectares de prairies. Laurine, elle, s’attache à la valorisation d’environ 300 litres de lait par jour en été. Lors de la reprise, la Chèvrerie du Châtelard était déjà engagée dans une démarche de qualité, en bio. Elle était aussi équipée d’un laboratoire pour fabriquer des fromages et yaourts, et faisait de la vente directe.

"En fonction des commandes, des marchés, on établit un planning de transformation chaque semaine, explique Laurine, qui a été satisfaite dès le départ de la taille de la structure et des débouchés pour ses produits, en vente en circuits courts comme en grande distribution. Hériter d’une clientèle simplifie les choses, mais ça n’est pas facile pour autant. On doit savoir conserver, au quotidien, la qualité de notre gamme de produits fermiers, sans quoi on perd nos clients."

Ainsi, les associées ont-elles de multiples casquettes : éleveuses, fromagères, commerciales… Les deux cheffes d’entreprise sont aussi manageuses puisqu’elles ont recruté deux saisonniers pour les accompagner huit mois par an dans cette aventure. "Certes, c’est un coût financier de prendre des salariés. Mais on y gagne en qualité de vie, au travail aussi bien qu’en dehors, pour son équilibre personnel et celui de son foyer, mesure Delphine. Et sur la viabilité de l’entreprise, je pense que c’est un gage de pérennité, sur le long terme."

70 à 80 installations aidées par an en Isère

Avec 50 % des actifs agricoles qui seront à la retraite d’ici 10 ans, le renouvellement des générations est un enjeu crucial en agriculture. Apporter un accompagnement personnalisé visant à l’installation des jeunes agriculteurs est une mission importante, assurée par le réseau des Chambres d’agriculture. "Nos conseillers spécialisés viennent en aide aux jeunes exploitants depuis le tout départ, c’est-à-dire la définition de leur projet, jusqu’au montage final de leur dossier, explique Jordan Desimone, élu référent de la Chambre d’agriculture de l’Isère. Cela veut dire qu’on réceptionne aussi les pièces et qu’on présente les projets aux partenaires à même de les subventionner, comme c’est le cas du Département de l’Isère, pour certaines aides." 

La Chambre d’agriculture accompagne sur de nombreux volets : étude économique, technique, bilan de compétences, mise en relation dans le cadre de recherche de repreneur ou d’associé… Des formations sont aussi dispensées pour permettre aux jeunes agriculteurs d’approfondir des dimensions de leur métier, revoir un plan comptable, un modèle d’entreprise. "On a un département qui installe beaucoup d’agriculteurs par rapport à d’autres, mesure Jordan Desimone. Chaque année, on recense entre 70 et 80 installations aidées. On se doit d’accompagner au plus près tous les porteurs de projet."